lundi 16 juin 2008

La der des der (6/7)


Combien de fois déjà, j'ai volé des places dans les derniers hectomètres ? Presque à chaque course. Ego quand tu nous tiens. Dernier virage, je suis à sa hauteur. Je sais ce qu'il faut faire; le laisser s'emballer; le laisser croire, rester de côté à peine derrière lui sans vraiment qu'il me voit et puisse me jauger. Lorsque le speaker annonce son numéro de dossard et son nom (salaud de militaire, c'est ma course, la der des der, tu n'as donc rien compris, je suis l'attraction !), j'allonge la foulée, il accélère. Sait-il seulement que mes grandes jambes sont capables d'aller vite. Sait-il qu'en classes primaires, j'étais le meilleur en sprint, en saut en hauteur, en saut en longueur et en course longue, que j'étais toujours le dernier à être touché au lapin-chasseur. Non ! Eh bien, il va être puni pour son ignorance, cruellement. Ego, ego, ego. Il y a maintenant plus de monde autour de l'arrivée. Eux aussi doivent comprendre que ce corps meurtri et abimé va leur en mettre plein la vue. Vous voulez du pain et des jeux. Vous aurez le sang du vainqueur entre ces deux là qui luttent pour briller sous la banderole d'arrivée. Ego, je t'appelle encore une fois et je pousse sur les jambes et la foulée est aérienne et les bras tirent sans se crisper. Le souffle puissant est coordonné à la fréquence des membres Il est des moments d'extases en sport où le corps et l'esprit fusionnent. J'y goutte là dans ces derniers instant alors qu'il reste 30 mètres. Je suis devant maintenant, je le sens s'accrocher désespérément. Cours toujours, échine-toi, je resterai à ma place ! J'entends à peine les cris de joies qui nous accompagnent.


P.S. Photo : l'ombre devant le coureur, c'est moi dans le sprint final. Remarquez le regard des spectateurs. Qui admirent-ils?

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